par Jennifer Waring
Cet article du comité sur l’intéressement du public décrit un projet réalisé à Toronto par Continuum en 2011. À l’époque, j’étais la directrice artistique de Continuum. Je ne présente pas ce projet comme un exemple à suivre (mais si l’idée vous plaît, n’hésitez pas à la reprendre); je souhaite simplement brosser rapidement le portrait d’un projet simple qui a su briser quelques conventions, ce qui lui a valu de se faire remarquer. Ce cas illustre aussi à quel point il faut s’exprimer clairement lorsqu’on s’aventure au-delà des pratiques normales, parce qu’on dirait que les gens vont soit s’accrocher obstinément à leur ancien territoire mental ou, au contraire, se sentir libérés au point de voir dans votre projet des choses qui n’y sont pas.
Le projet OCADU de Continuum était une expérience de transfert des modes de perception d’un art sur un autre. Nous avons demandé à des étudiants inscrits en quatrième année du programme Critique et commissariat d’art à l’Université OCAD de programmer un concert et de rédiger les notes de programme. Quinze personnes, des jeunes pour la plupart, toutes profondément impliquées dans les arts visuels, ont écouté treize enregistrements puisés dans le répertoire de Continuum. Puis, elles ont fait un choix, avant d’écrire les notes qui guideront les autres auditeurs. Ils ont fait leur écoute en vase clos, avec l’ordre de ne pas effectuer de recherches supplémentaires. Les œuvres sélectionnées par ce groupe ont été jouées dans un concert de la programmation régulière de Continuum (le fait de remonter ces œuvres étant un avantage collatéral offrant à nos fidèles la chance de les réentendre, aux musiciens la chance de les réinterpréter, et à Continuum l’occasion de faire progresser la notion d’un « répertoire » des musiques nouvelles). J’ai choisi les meilleures « notes d’écoute » des étudiants pour colliger les notes de programme. En fait, le bon matériel était si abondant que j’ai colligé trois jeux de notes de programme. Les textes allaient de la description méticuleuse au flux de conscience onirique. Chacun apportait un éclairage différent sur l’œuvre comme sur l’auteur du texte, avec beaucoup de liens entre musique et arts visuels. (Voici le programme : PDF.)
Qu’aurait-il fallu mieux communiquer ? À cause du titre « Le projet OCADU », certaines personnes (qui ne sont pas allées au-delà du titre) s’attendaient à de la musique interprétée dans le cadre d’une exposition. Peut-être aurait-on dû choisir un autre titre ou encore décrire le projet de diverses manières et plus souvent. (Je n’ai rien contre la présentation de musique et d’expositions d’arts visuels côte à côte, mais notre objectif consistait à amener des jeunes à écouter, à réfléchir par l’écriture et à monter une programmation.) Quant au fait d’avoir plusieurs notes de programme différentes circulant dans la salle, j’espérais que les gens échangent leurs documents, voire qu’ils les collectionnent. Or, malgré les directives imprimées sur les programmes et les consignes que j’ai énoncées sur scène, les spectateurs s’en sont tenus à la feuille qu’ils avaient ramassée à l’entrée. Si c’était à refaire (et Continuum a failli toucher une subvention pour faire ce projet avec un groupe de 300 étudiants en philosophie chaque année pendant trois ans), je réprimerais l’envie de circuler dans l’assistance pour échanger les programmes entre les mains des gens, mais j’essaierais d’être plus claire. Et je referais ce projet chaque année, pour que le public s’habitue au concept.
Grâce à ce petit projet, quinze étudiants se sont débattus avec ce qu’ils entendaient ; ils ont couché leurs réflexions sur papier, puis la moitié d’entre eux sont venus au concert. Et nous avons eu l’occasion d’apprendre comment ils percevaient une expression musicale qui nous est si familière que nous sommes parfois sourds à une partie de sa signification ou, à tout le moins, de son effet. Une expérience à refaire, à mon avis.
Pour en savoir plus sur cette initiative, écrivez à Jennifer Waring, jwaring@interlog.com.
Nous sommes à la recherche de bons coups à partager ! Si vous connaissez ou avez participé à un projet particulièrement inspirant touchant à l’intéressement du public, écrivez à Louise Campbell, mlouisecampbell@gmail.com
Adresse URL directe : Des étudiants en commissariat et en critique d’art rencontrent Continuum dans le cadre du Projet OCADU
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