CNMN > Projects > Geremia Lodi - Sur la musique avec d'anciens détenus

Geremia Lodi

See profile

  • Ouvert (définition : partitions pour une instrumentation non spécifiée)
  • Adultes
  • Ainés
  • Associations communautaires
  • Justice

Geremia Lodi - Sur la musique avec d'anciens détenus

description

Dans le cadre de la res­source sur la musique en milieu car­cé­ral et de réadap­ta­tion, Gere­mia Lodi décrit son expé­rience de tra­vail avec d’an­ciens déte­nus dans le cadre d’un pro­gramme de tran­si­tion en com­mu­nau­té, les avan­tages poten­tiels de la mise en œuvre de pro­grammes musi­caux dans des situa­tions com­plexes telles que l’in­car­cé­ra­tion et la réadap­ta­tion, ain­si que diverses ques­tions liées aux pra­tiques d’auto-soin.

Sur sa pre­mière expé­rience de tra­vail avec d’an­ciens détenus

Bon­jour, je m’ap­pelle Gere­mia Lodi. Je suis musi­cienne et édu­ca­trice musi­cale. Mon but dans la vie est d’u­ti­li­ser la musique pour créer une connexion entre les gens, tout en uti­li­sant cette connexion pour créer des sons musi­caux et des sons plus per­son­nels et intimes ensemble.

Mon outil pré­fé­ré pour la musique est la musique cor­po­relle – la per­cus­sion cor­po­relle, le chant et le beat­boxing en d’autres termes. Tout ce que nous pou­vons faire direc­te­ment avec notre corps et peut-être sans ins­tru­ment. J’aime cela parce que cela per­met à chaque par­ti­ci­pant à mon ate­lier d’ap­por­ter direc­te­ment la musique qui se trouve dans son corps, dans son expé­rience, et c’est une approche acces­sible de la musique.

Mon expé­rience avec les anciens déte­nus est assez limi­tée et concerne ma col­la­bo­ra­tion avec les com­mu­nau­tés basées à Mont­réal, en par­ti­cu­lier l’i­ni­tia­tive Open Door. Open Door est une réunion heb­do­ma­daire ouverte aux anciens déte­nus, par­fois aus­si aux déte­nus actuels avec un per­mis, pour ren­con­trer des per­sonnes de la com­mu­nau­té et créer un nou­veau lien pour sou­te­nir leur inté­gra­tion dans la société.

Lorsque j’ai pro­po­sé un ate­lier à cette asso­cia­tion, j’ai ren­con­tré un groupe très curieux de ce que j’a­vais à offrir, et vrai­ment prêt à sai­sir la chance de pas­ser un moment de plai­sir ensemble, un moment d’interaction.

L’ac­ti­vi­té que je me rap­pelle avoir le plus appré­ciée est l’une de mes acti­vi­tés inti­tu­lée « Les rythmes silen­cieuses ». Je demande à chaque par­ti­ci­pant d’ef­fec­tuer un mou­ve­ment silen­cieux et répé­ti­tif, mais je demande aux autres par­ti­ci­pants si, en écou­tant avec leurs yeux, ils peuvent entendre quelque chose dans leur ima­gi­na­tion. Si l’i­ma­gi­na­tion peut pro­duire un son. Gui­dés par ce mou­ve­ment, les par­ti­ci­pants peuvent, la plu­part du temps, pro­duire quelque chose qui répond à ce mouvement.

Dans la deuxième série de per­sonnes exé­cu­tant un mou­ve­ment, les per­sonnes situées à l’op­po­sé dans le cercle de l’au­teur du mou­ve­ment don­ne­ront de la voix. Nous chan­tons le mou­ve­ment que nous enten­dons dans notre ima­gi­na­tion. Les par­ti­ci­pants ont fait remar­quer qu’il était très récon­for­tant d’en­tendre son mou­ve­ment à tra­vers la voix de quel­qu’un d’autre. Entendre quel­qu’un don­ner une voix à son corps, c’est une façon de regar­der, c’est une façon de prê­ter atten­tion à l’autre, mais c’est aus­si une façon de s’ou­vrir à l’autre, de prê­ter atten­tion à l’autre, mais cela fait remon­ter à la sur­face ce réseau de réci­pro­ci­té qui relie tous les membres d’un groupe, mais qui n’est pas tou­jours évident. Il n’est pas tou­jours facile à per­ce­voir et à res­sen­tir. Je pense que c’est aus­si un indice de l’une des façons dont la musique peut être béné­fique pour les per­sonnes qui font l’ex­pé­rience de la péni­tence. Il s’a­git de res­sen­tir cette recon­nexion aux autres d’une manière différente.

Pour­quoi et com­ment la musique est-elle utile dans le contexte de la réha­bi­li­ta­tion et de l’incarcération ?

Prendre soin de soi avant, pen­dant et après le projet
Prendre soin de soi avant, pen­dant et après le pro­jet. Mon expé­rience per­son­nelle en matière d’au­to­soins ne vient pas du tra­vail dans un péni­ten­cier, mais plu­tôt du tra­vail dans une com­mu­nau­té urbaine. Il s’a­git d’un contexte très dif­fé­rent, mais ce qui est com­mun avec le péni­ten­cier, c’est qu’en tant qu’é­du­ca­teur, vous serez témoin d’ex­pé­riences de vie très dif­fi­ciles. Un deuxième élé­ment com­mun est qu’il s’a­git d’ex­pé­riences aux­quelles la plu­part des gens dans la socié­té ne sont pas vrai­ment expo­sés, ce qui vous fera vous sen­tir un peu plus seul à un moment ou à un autre. Nous en repar­le­rons dans une minute. La pre­mière chose qui me vient à l’es­prit à pro­pos de l’au­to­no­mie est de m’as­su­rer que je suis suf­fi­sam­ment payé pour ce contrat. Cela peut sem­bler amu­sant, mais je pense que lorsque vous tra­vaillez sur un tel pro­jet, vous devez vous assu­rer de consa­crer suf­fi­sam­ment de temps au brie­fing, à l’é­la­bo­ra­tion de ce que vous vivez, et d’être payé équi­ta­ble­ment afin de pou­voir payer votre loyer sans avoir à cher­cher un contrat sup­plé­men­taire pour vous sen­tir plus en sécu­ri­té, c’est vrai­ment impor­tant. Ce n’est pas une ques­tion d’a­vi­di­té, c’est juste une ques­tion de se don­ner le temps d’é­la­bo­rer. Bien enten­du, il s’a­git éga­le­ment du deuxième élé­ment, étant don­né que vous aurez besoin de temps pour élaborer.

Le troi­sième élé­ment consiste à prendre en compte les res­sources de l’as­so­cia­tion ou de l’ins­ti­tu­tion pour laquelle vous tra­vaille­rez en termes de par­te­na­riat. Quels sont les autres indi­ca­teurs et quelle est la rela­tion que vous allez éta­blir avec eux ? S’a­gi­ra-t-il d’un par­te­na­riat por­tant éga­le­ment sur le compte ren­du et l’é­la­bo­ra­tion du pro­jet ensemble ou non ? Com­bien de temps y consa­cre­rez-vous ? L’autre per­sonne fera-t-elle ce tra­vail ? Ce sont des élé­ments impor­tants à connaître. Quelle est la base de cette col­la­bo­ra­tion et quel est votre rôle dans la réa­li­sa­tion de ce pro­jet ? Ce que l’on attend de vous et com­ment votre rôle s’ins­crit dans la même struc­ture glo­bale dans laquelle vous êtes un acteur, mais pas entiè­re­ment res­pon­sable du pro­jet. Il est vrai­ment impor­tant d’a­voir une vision claire de votre monde. Pour pou­voir vous pla­cer dans ce projet.

Un autre élé­ment est, avant la fin du pro­jet, d’a­na­ly­ser votre réseau, votre réseau per­son­nel, quels sont les amis qui peuvent offrir une bonne écoute, mais aus­si une écoute qua­li­fiée ou com­pé­tente. Comme je le disais, dans ma propre expé­rience, lorsque je vivais dans le Nord, j’ai res­sen­ti une cer­taine résis­tance à par­ta­ger cer­taines his­toires avec mes amis à pro­pos de ce dont j’a­vais été témoin. Il me sem­blait quelque peu irres­pec­tueux d’é­vo­quer cer­taines his­toires sans offrir le contexte com­plet dans lequel elles s’ins­cri­vaient. Et ce contexte est par­fois très dif­fi­cile à fournir.

C’est vrai­ment dif­fi­cile à dire. Il y a tel­le­ment de choses que je ne pou­vais pas nom­mer ou que je ne pou­vais pas com­prendre moi-même pour expli­quer le contexte dans lequel je vivais, mais c’é­tait dif­fé­rent si je par­lais à quel­qu’un qui avait vécu la même expé­rience et qui avait déjà une idée de ce dont je par­lais, quel­qu’un qui a vécu la même expé­rience et qui a déjà une idée de ce dont je parle. Il est donc très utile de véri­fier si vous avez déjà dans votre réseau quel­qu’un qui a vécu des expé­riences simi­laires et qui pour­rait être un bon par­te­naire pour débrie­fer, pour avoir une oreille attentive.

Enfin, et sur­tout s’il s’a­git d’un pro­jet à long terme, il est très utile de lire les expé­riences ins­pi­rantes d’autres per­sonnes qui tra­vaillent dans un contexte simi­laire et qui ont été confron­tées à des pro­blèmes sem­blables. Il est par­fois très apai­sant de se faire accom­pa­gner de cette façon, par quel­qu’un d’autre qui est pas­sé par le même che­min. En fait, il y aura plus avec ce qu’ils vou­laient par­ta­ger et par­fois aus­si un très bon rire. Vous serez confron­tés à des expé­riences de vie très dif­fi­ciles et vous aurez besoin, au cours de la semaine, de vous recon­nec­ter à votre propre vita­li­té, à tout ce qui vous fait vous sen­tir vrai­ment vivant.

Les déte­nus ont besoin de se connec­ter à ce qui est vrai­ment vivant pour eux, à ce qui est vrai­ment amu­sant et joyeux, et vous devrez faire la même chose pour vous-même chaque semaine. Un col­lègue du Nord m’a dit qu’il fal­lait s’as­su­rer d’être heu­reux au moins trois fois par jour. C’est drôle, mais je pense que c’est une sug­ges­tion très pré­cieuse. Veillez à vous connec­ter à votre éner­gie vitale, à la par­tie la plus vitale de votre être chaque semaine, et si pos­sible trois fois par jour. Parce que c’est très impor­tant pour vous, dans un contexte dif­fi­cile, d’être en pleine pos­ses­sion de vos moyens.

Ne vous sur­char­gez pas avec la par­tie sombre, car nous avons vrai­ment besoin de la par­tie vivante pour être dans ce contexte. N’ayez pas peur d’être légers et drôles.

D’ac­cord.

Pour­quoi réa­li­ser un pro­jet dans un éta­blis­se­ment pénitentiaire ?

Pour­quoi réa­li­ser un pro­jet dans un péni­ten­cier, ou dans un autre lieu complexe ?

Cette ques­tion peut sem­bler étrange, mais je vou­lais faire ce tuto­riel et j’ai été ins­pi­ré par une phrase de Geno­stra­da, le fon­da­teur de l”  »Asso­cia­tion d’ur­gence » qui four­nis­sait un sou­tien médi­cal dans les zones de guerre. Il a men­tion­né que les gens vou­laient qu’il dise qu’il fai­sait ce qu’il fai­sait en tant que sergent.
ser­gent, dans un tel contexte, parce qu’il s’a­gis­sait d’une bonne cause, parce qu’elle était ani­mée d’une très bonne inten­tion. Mais il n’hé­si­tait pas à dire qu’il le fai­sait sim­ple­ment parce qu’il aimait vrai­ment le faire. C’est la raison.

Nous l’a­vons ensuite refor­mu­lé d’une autre manière, en uti­li­sant une phrase de Lila Wat­son qui m’a beau­coup ins­pi­rée à l’é­poque. Lila Wat­son dit : « Si vous êtes venus pour m’ai­der, vous per­dez votre temps, mais si vous êtes venus parce que votre libé­ra­tion est liée à la mienne, tra­vaillons ensemble ». Je pense que cette phrase m’a vrai­ment aidée à me situer, et dans un contexte où je me trou­vais face à des per­sonnes confron­tées à des situa­tions vrai­ment dif­fi­ciles, mais qui trou­vaient un moyen de rési­lience et une capa­ci­té per­son­nelle forte.

D’une cer­taine manière, cette prise de conscience m’a aidée à gar­der un équi­libre, à me sen­tir res­pon­sable de moi-même, res­pon­sable de ce que j’é­tais, res­pon­sable de ma pro­fes­sion­na­li­té, mais aus­si à réa­li­ser que cette res­pon­sa­bi­li­té impli­quait de ne pas assu­mer les res­pon­sa­bi­li­tés d’autres per­sonnes. En fait, cela aurait pri­vé ces per­sonnes de leur propre res­pon­sa­bi­li­té, de leur propre capacité.

Et je me sou­viens tou­jours de la rai­son pour laquelle j’é­tais là, mais c’é­tait ma propre rai­son. Cela me per­met de me rap­pe­ler que chaque per­sonne a sa vie ou son his­toire de vie, et que mieux recon­naître notre uni­ci­té et notre dif­fé­rence est la base pour per­mettre cette ren­contre où cha­cun peut offrir à l’autre quelque chose d’im­por­tant pour notre propre che­min en tant qu’êtres humains. C’est ce que je vou­lais évo­quer avec ce tuto­riel. J’es­père qu’il vous sera utile.

Je vous remer­cie de votre attention.

 

Pour plus d’in­for­ma­tions sur Gere­mia Lodi, consul­tez son pro­fil d’ar­tiste ICI. Pour avoir un aper­çu de ce que fait Gere­mia Lodi, explo­rez les pro­jets sui­vants pré­sen­tés sur le PCM Hub :

 

Pour plus d’in­for­ma­tions sur la musique en milieu car­cé­ral et de réadap­ta­tion, visi­tez ICI

lire la suite +

Vidéo

Galerie d'images