Dimanche 26 mars 2017, à 14 h 30 à 16 h 30 (heure du Pacifique)
Open Space Arts Society, 2e étage du 510 rue Fort, Victoria, C.-B
Un projet RCMN soutenu par FACTOR et présenté à Victoria avec Open Space Arts Society
Nous remercions nos partenaires et commanditaires pour leur aide dans la réalisation de ce projet.
Rapport : Jennifer Waring
Animateur :
Christopher Reiche Boucher, Coordinateur de musiques nouvelles, Open Space (Victoria)
Conférenciers :
Rachel Iwaasa – Directeur du développement, Pride in Art Society (Vancouver)
Juliet Palmer – compositrice/collaboratrice/Directrice artistique, Urban Vessel (Toronto)
France Trépanier – Commissaire autochtone, Open Space (Victoria)
La session à Victoria a suivi six semaines après la première lancée à Halifax. La conversation sur la diversité était reprise, mais sous l’angle de l’engagement du public. L’activité de deux heures et demie était divisée en deux parties : une table ronde en cercle avec le public diffusée en direct et un exercice de cercle à huis clos qui s’est éventuellement divisé en groupes de discussion plus petits. Juliet Palmer a assuré la continuité des sessions ; comme lors de la session précédente, elle a dirigé l’exercice en cercle.
Christopher Reiche Boucher, coordinateur des musiques nouvelles à Open Space et animateur de la conversation a souhaité la bienvenue à tout le monde. Il y avait 22 personnes en personne et 14 personnes connectées en direct. Christopher a reconnu les territoires non cédés et traditionnels des nations Songhese et Esquimalt. Il a remercié les commanditaires d’avoir soutenu cet événement et a invité tous les participants à se présenter.
Dans ses remarques d’ouverture, l’animateur a identifié trois groupes différents : les créateurs, les publics et les communautés, puis a demandé si les publics et les communautés sont distincts, ou le même.
Rachel
Je pense qu’ils se chevauchent. Je pense qu’il est important de parler de communauté, mais les communautés – nous avons plusieurs identités. C’est le même pour les communautés auxquelles nous appartenons. Les communautés grandissent et changent constamment, ce qui signifie que ce n’est pas juste une communauté. Lorsque nous parlons de la communauté des musiques nouvelles, nous ne parlons pas nécessairement de toutes les communautés partageant cet espace.
Juliet
Je suis d’accord avec Rachel de mon point de vue comme créatrice, je crée dans un contexte communautaire. Dans ce contexte, nous créeons des œuvres avec une communauté.
France
La notion de communauté est intéressante. Je travaille souvent dans ce sens. La communauté avec laquelle je m’engage n’est pas un public, ni un public futur. Je pense qu’il y a un moyen de nouer un dialogue avec une communauté qui deviendra éventuellement un public. C’est en dialogue avec une communauté que nous arrivons à comprendre où ils se trouvent, non pas selon nos conditions, mais selon les leurs. Définir ce dont le public a besoin et ce qu’il souhaite modifie considérablement la conversation. C’est une entreprise à long terme. Du point de vue autochtone, là où nous travaillions, où que vous travailliez, il y a une communauté de Premières Nations, et nous travaillons sur leurs terres, donc c’est la première communauté qu’on devrait reconnaître, engager et respecter.
Principaux commentaires et idées :
Les barrières à la participation comme public et comme artistes :
- Par leur nature même, les musiques nouvelles sont exclusives.
- À bien des égards, c’est l’expression actuelle du courant « classique », avec tous les protocoles non-dits de la musique classique qui font relever un sentiment de honte chez les gens, comme s’ils ne pouvaient pas participer s’ils ne savent pas comment comprendre l’événement. Par conséquent, c’est important comment on se présente sur scène ; et cela peut avoir un impact énorme lorsque on essaye de connecter avec des communautés en dehors des communautés étroites déjà présentes.
- France a souligné que l’infrastructure de l’art est récente au Canada. Il a été créé dans les années 50 à une époque où les cultures autochtones n’étaient pas considérées comme des cultures vivantes mais plutôt en voie de disparition, et leurs pratiques étaient toujours interdites. Les concepteurs du système n’avaient à l’esprit que des formes d’art d’origine européene
Nous vivons dans un système d’art très raciste, qui privilégie les traditions issues d’Europe occidentale… c’est très inconfortable par moments. – France
Diversité et inclusion par opposition à donner de l’espace
Chris savait que France avait un problème avec l’idée de l’inclusion et lui a demandé d’expliquer.
D’abord je m’adresse à la diversité. Tout le monde est diverse. Qu’est-ce que ça veut même dire ? C’est comme la bouffe ethnique – toutes les cuisines sont ethniques. Donc il faut faire attention à comment on déploie ces mots. Chaque culture est différente par définition. Mais maintenant la question d’inclusion, regardons-la de plus près. Nous avons un pays où, pour des millénaires, il y avait une culture vivante. Puis les européens sont arrivés, il y a eu un changement radical, des systèmes mis en place qui privilégiaient des européens. Et puis ces européens se redressent et maintenant veulent inclure ces cultures dites diverses, braconnant leur communautés. C’est aussi néfaste que leurs autres pratiques. – France
L’inclusion maintient la centralité de la culture européene et une tradition intellectuelle qui a été très oppressive. Si on veut vraiment parler de diversité, il faut qu’on se pose des défis, qu’on soit rigoureux et assez souple pour laisser des pratiques et des savoirs différents de rentrer. – France
Et puis : Cela ne met aucune musique ou pratique classique à part, elle appartient à sa propre tradition, mais elle doit partager l’espace. – France
- Un membre du public a exprimé ses préoccupations quant aux effets de la diversité prescrite. Peut-être serait-il préférable de considérer tous les différents types de pratiques et la diversité en eux-mêmes, plutôt que de faire en sorte que tout le monde soit considéré diverse/ Sinon, les pratiques de tout le monde pourrait devenir un cambouis.
- Un autre membre du public a déclaré que le conseil des arts ne peut pas imposer et exiger la diversité. Le système doit changer.
Les systèmes et la pérennité du status quo
- Il a été remarqué que les communautés autochtones de s’isolent pas dans leurs formes d’art ; ils ont une approche différente au processus que les traditions occidentales.
- Les ghettos ont été identifiés par Juliet comme un problème dans les musiques nouvelles du courant classique, relégués aux festivals, our certains concerts plutôt qu’être intégrés.
- Un membre du public a rappelé le système de classe économique comme l’élephant dans la boutique : les grands arts sont soutenus par un système qui dénigre les arts folkloriques / populaires et la notion du populaire en général. Même si il y avait une place pour l’art d’élite, il y a peu d’élan pour inclure ceux qui sont désavantagés de manière systémique.
- Rachel a suggéré qu’on doit identifier les systèmes avant de savoir comment les démanteler. Des interventions ciblées peuvent aider. Exemple : le festival d’art queer comprend une portée d’identités, mais en 2017, ils ont monté un festival bi-spirituel, qui c’est avéré le moins diverse de tous leur festivals. C’était un pas nécessaire, par contre, pour mettre l’emphase sur ce groupe – et c’était une décision consciente des commissaires et non le résultat du système en arrière plan.
- En éducation, il y a la question de qui enseigne et la matière qu’ils enseignent. Le système pérénnise le status quo.
- Ce qui soutient aussi le status quo : la plupart des gens blancs ne se voient pas comme blant. Comme penser qu’on n’a pas d’accent.
L’engagement de la communauté
- L’art devrait être du quotidien. Nous sommes piégés par la pensée que c’est une profession, qui mène à des conversations de marketing et la diversification des sources de financement.
Pensant à sa jeunesse en Nouvelle-Zélande : Dans les années 70, il y avait une renaissance de l’identité autochtone et l’enseignement des danse et de la langue aux enfants. Cela a eu un impact énorme sur moi – comprendre la culture et les pratiques de cérémonie. Ce n’était pas un événement ou on pensait à la vente de billets, mais une partie de la vie. Je tente de manifester cela dans mon propre travail. Il s’agit de faire des œuvres ensemble, de ne pas vendre de billets et de sortir des salles et les lieux de concert habituels. – Juliet
L’idée de remplir les salles est très eurocentrique. Quand j’étais au conseil, nous avions une compagnie de théatre du Nord qui essayait de suivres les lignes directrices de marketing… Je leur ai donné permission de le faire comme ils voulaient, et ils sont allé à l’épicerie et ont acheté de la nourriture pour un festin. La salle de concert était remplie. Quand on pense de l’art comme marchandise, c’est très eurocentrique. – France
Identité et présomptions : à quoi ça ressemble / comment les choses sont vraiment et comment leut apparence influence ce qu’elles sont
Un commentaire provenant de la difussion en direct que tous les conférenciers avaient l’air blancs a suscité les réponses suivantes :
Je suis Mohawk et française, je viens du Québec et je vis sur le territoire des Coast Salish. – France
Je suis une femme qui fait partie du 20% de la communauté des compositeurs. Je suis une immigrante au Canada. – Juliet
Mon héritage est danois et japonais. On me classe comme blanche et straight tout le temps. Ce qui me rend minoritaire n’est pas visible. Ce que je trouve intéressant c’est que souvent on n’est pas conscient de la diversité qui nous entoure parce qu’on base nos jugements sur ce qu’on voit. – Rachel
L’animateur a souligné qu’il y a une très grande importance attachée au visible, avec la réponse suivante de la part de Rachel :
oui, c’est notre première impréssion. Si les gens lisent mon nom, ils me reconnaissent comme japonaise plus tôt. Je crois que le visible qu’on met de l’avant est important, surtout dans des organismes – nous essayons de créer un environnement qui attire une plus grande variété de gens. – Rachel
Ce qui a mené à l’observation que les membres d’un CA, ceux qu’on engage, ceux qui font les décisions sont importants. L’enjeux est le pouvoir.
Le système est blanc – sans pointer vers des particuliers, comment pouvons nous adresser les inégalités de pouvoir et d’accès au ressources ? Je profite de certains privilèges parce que je passe comme blanche. – France
Un membre du public soulève que comme Métis, on n’est pas accepté comme autochtone. Le problème n’est pas seulement qui représente un organisme, mais à qui est celui-ci responsable ?
À cause de l’effacement systématique (enfants autochtones enlevés de leurs familles, l’expérience japonaise pendant la guerre), nous voyons maintenant des efforts de récupérer les identités.
Mentorat et droits d’auteur / inclusion des gens qui ne peuvent pas entrer
- Membre du public – La communauté de musiques nouvelles semble affirmer qu’il n’y a pas de compositeurs de couleur. Ce n’est pas un racisme individuel délibéré, mais un racisme systématique. Comment pouvons-nous aider à informer ces organisations ?
- Il y a beaucoup de compositeurs qui ne sont pas des hommes blancs qui cherchent des opportunités. Il faut sortir les trouver.
- Lorsqu’il est question d’aider les artistes de communautés diverses à participer dans ces formes blanches, il est nécessaire de trouver quelqu’un qui puisse soutenir la voix de quelqu’un d’autre – le mentorat, le témoignage et t le développement du talent. Le modèle traditionnel ne fonctionne pas, où le compositeur est incapable de renoncer ses droits d’auteur uniques.
J’étais la seule personne autochtone disponible pour participer à un projet où un compositeur voulait travailler avec les gens autochtones. Je devais me battre pour lui faire comprendre que c’était inapproprié. Si vous ne comprenez pas la tradition et les protocoles ou l’esthétique, vous pouvez accepter le mérite ou l’excellence. Les différentes traditions sont la clé ici. – France
En conclusion
On revient à la question d’intentions.
Pourquoi ? Ma première question est toujours pourquoi ? Pourquoi a‑t-on besoin de plus de diversification ? Pourquoi aurait on besoin de publics plus nombreux ? Pourquoi voudriez-vous faire cela ? – France
Conversations en petits groupes
Pour la deuxième partie de la session, les participants se sont divisés en petits groupes pour discuter des phrases courtes écrites sure des cartes par leurs collègues et redistribuées anonymement. Le groupe complet s’est réuni par la suite pour partager des idées résumées.
Cartes communautaires des sessions de Halifax, Victoria et Montréal.
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