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Hugh Chris Brown

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Hugh Chris Brown - Sur l'importance de la musique dans les prisons

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Dans le cadre de la res­source sur la musique en milieu car­cé­ral et de réadap­ta­tion, Hugh Chris Brown décrit son expé­rience de créa­tion musi­cale dans son pro­gramme Pros & Cons, son ori­gine, l’ef­fi­ca­ci­té de la musique en pri­son, ce que la créa­tion musi­cale lui a appor­té ain­si qu’aux déte­nus, et les pra­tiques d’au­to-soin qu’il uti­lise pour se main­te­nir dans ce travail.

Sur ses pre­miers pas dans la mise en place du pro­gramme artis­tique en pri­son Pros & Cons

Bon­jour, je m’ap­pelle Hugh Chris­to­pher Brown. Je m’i­den­ti­fie comme il/lui, tou­jours ouvert aux sug­ges­tions pour l’a­mé­lio­ra­tion, et mon expé­rience avec l’in­car­cé­ra­tion et la réadap­ta­tion découlent uni­que­ment à par­tir d’un pro­gramme de musique que j’ai déve­lop­pé, appe­lé « Les Pros et les Cons ».

Ini­tia­le­ment, c’é­tait une réponse à la fer­me­ture des pro­grammes agri­coles dans les pri­sons, un pro­gramme très réus­si qui était sur le point d’être arrê­té, et en tant que musi­cien, je me suis juste dit « Oh, je vais entrer et faire ce que je sais faire et faire quelque chose de posi­tif là-dedans ». Parce que je ne l’ai pas esti­mé qu’il s’a­git d’un avan­tage pour les per­sonnes incar­cé­rées ou les délin­quants allaient réel­le­ment tra­vailler, j’ai réa­li­sé à ce moment-là que nous avions affaire à une popu­la­tion vul­né­rable, et ils étaient vul­né­rables parce qu’ils avaient fait du mal à autrui. Qui est une chose dif­fi­cile à com­prendre pour les gens.

Au cours des 10 der­nières années, c’est éten­du à plu­sieurs ins­ti­tu­tions. C’est main­te­nant une cha­ri­té natio­nale. C’est par­ti d’a­te­liers d’é­cri­ture de chan­sons, à construire des stu­dios d’en­re­gis­tre­ment dans les pri­sons, et dif­fu­ser les enre­gis­tre­ments qui sont faits par les déte­nus qui sont ensuite liés à acti­vi­tés cari­ta­tives au choix de l’au­teur. C’est donc un modèle de res­tau­ra­tion de la jus­tice et une façon d’ex­ploi­ter le temps des gens à l’in­té­rieur de manière fructueuse.

Mes pre­miers pas pour entrer étaient en éta­blis­sant des rela­tions. Dans mon cas, avec Kate John­son qui était aumô­nier en pri­son et qui a ren­du pos­sibles ces pre­miers ate­liers. Ensuite, il s’a­gis­sait de nouer des rela­tions les déte­nus eux-mêmes, leur deman­dant ce qui s’al­lait bien, obte­nir leurs conseils. J’ai tou­jours pen­sé à construire un pro­gramme et ensuite don­nez-le aux ser­vices cor­rec­tion­nels, mais les déte­nus et les res­pon­sables des ser­vices cor­rec­tion­nels eux-mêmes ont dit non. Cela fonc­tionne parce que c’est indé­pen­dant et les gens viennent de leur propre gré.

Les autres rela­tions a com­men­cé à être construit avec les agents de pro­gram­ma­tion et les bureaux régio­naux et locaux du sous-com­mis­saire qui ont été d’une valeur ines­ti­mable. À ce jour, je dirais la com­mu­ni­ca­tion et les rela­tions sont pri­mor­diales. J’ai éga­le­ment été enca­dré par des per­sonnes qui tra­vaillent dans les pri­sons depuis des années et sous dif­fé­rents aspects. Tout, des agents cor­rec­tion­nels aux ani­ma­teurs des acti­vi­tés de bien-être et de santé.

Il y a beau­coup à apprendre et beau­coup de gens ont déjà effec­tué ces étapes de base, alors apprenez-en.

Sur l’ef­fi­ca­ci­té de la musique dans les prisons

D’ac­cord, je vais juste par­ler un peu main­te­nant l’ef­fi­ca­ci­té et le but de la musique. Je dirais les arts en géné­ral, dans les popu­la­tions incar­cé­rées. L’une des choses qui est très dif­fi­cile est l’i­den­ti­fi­ca­tion à la cri­mi­na­li­té, à la fois un fac­teur de stig­ma­ti­sa­tion, puis comme un moyen de défense légi­time à l’in­té­rieur. Ce que j’ai remar­qué, c’est quand les gens viennent en
groupe, soit en enre­gis­trant, soit en chan­tant, qui sera réti­cent à par­ta­ger. Pour lit­té­ra­le­ment ouvrir la bouche.

Et puis tout d’un coup tu par­ti­cipes à la musique et c’est attrayant. Et la musique est un art tem­po­rel. Tu n’as pas d’autre alter­na­tive que d’être pré­sent, et ce pré­sent aus­si dou­lou­reux soit-il, la musique et l’art sont une pla­te­forme émo­tion­nelle qui peut
aider à atté­nuer ce défi. Je l’ai vu plu­sieurs fois où les gens passent d’être tota­le­ment soli­taire à com­plè­te­ment enthou­siaste, parce qu’une fois qu’ils ont fran­chi ce seuil, ils veulent par­ta­ger cette expé­rience avec les autres.

C’est aus­si don­ner aux gens les rênes de leur propres vies. La musique est quelque chose qu’ils peuvent tra­vailler en pri­vé. Ce n’est pas ordon­né ou jugé par les autres avant tout, même s’ils le feront me le demandent assez sou­vent, ils veulent juste que je les traite comme n’im­porte quel autre musi­cien pro­fes­sion­nel, ce qui est ce que je fais.

Le but de ce pro­jet ne cesse de chan­ger et de s’é­tendre. Au début, c’é­tait une réponse à l’an­nu­la­tion non seule­ment des pro­grammes agri­coles, mais aus­si des modi­fi­ca­tion de l’au­mô­ne­rie. L’an­nu­la­tion, dans cer­tains cas, des pro­grammes culinaires.Et donc, cela com­blait un vide. Main­te­nant, qu’est-ce qu’il fait une décen­nie plus tard, il emploie des gens à l’ex­té­rieur, tant en musique, qu’en ingé­nie­rie, en tâches spé­ci­fiques, mais aus­si par­fois dans l’or­ga­ni­sa­tion com­mu­nau­taire, et je ramène des déte­nus à l’in­té­rieur pour tra­vailler avec des personnes
actuel­le­ment incar­cé­rées parce que qu’à ce moment-là, l’in­car­cé­ra­tion passe du sta­tut de han­di­cap à celui d’a­tout. Donc moi, en tant que musi­cien, je peux faire beau­coup de travail
quand je fais venir quel­qu’un qui a été à l’in­té­rieur. Rien que par leur pré­sence, ils font un tra­vail que je ne peux pas faire nécessairement.

Je consi­dère donc que l’ob­jec­tif s’est élar­gi comme un moyen de gla­ner un aspect employable de l’ex­pé­rience de l’in­car­cé­ra­tion, et j’es­père que cela se déve­lop­pe­ra pour nous à mesure que le pro­gramme s’a­gran­dit, main­te­nant que nous sommes un orga­nisme de bien­fai­sance natio­nal. C’est l’un des aspects que la musique pour­rait ser­vir quel­qu’un quand il sort de pri­son en termes d’intégration.

L’autre façon dont cela sert défi­ni­ti­ve­ment est juste pour socia­li­ser les gens pen­dant qu’ils sont à l’intérieur.

Sur la culture car­cé­rale et les pro­blèmes ren­con­trés par les déte­nus à l’in­té­rieur et à l’ex­té­rieur des prisons.

L’autre façon dont cela sert défi­ni­ti­ve­ment est juste pour socia­li­ser les gens pen­dant qu’ils sont à l’in­té­rieur. Les popu­la­tions incar­cé­rées peuvent être très iso­lé, très cam­pé, et la musique devient natu­rel­le­ment œcu­mé­nique. Elle est par­ta­gée entre dif­fé­rentes cultures et nous avons eu l’ex­pé­rience où dans un cas,un déte­nu blanc fai­sait de la musique avec des rap­peurs, et il disait « si ma famille savait que j’é­tais dans la chambre avec des noirs, ils me renie­raient ». Comme vous le savez, ce n’est pas une décla­ra­tion cho­quante, et aus­si quelque chose qui a ensuite duré des semaines de conver­sa­tion, et je pense que cela affecterait
l’at­ti­tude de cette per­sonne lors­qu’elle est à l’extérieur.

En pre­nant soin de la musique ensemble et en créant une véri­table forme d’in­ter­dé­pen­dance, je pense que nous sommes témoins de ce que les autres sont utiles. Nous construi­sons la confiance et nous réa­li­sons que beau­coup de choses sont pos­sible lorsque nous avons cette confiance. Et cette confiance, cela a sou­vent été refu­sé aux gens qui se retrouvent dans les pri­sons bien avant leur incar­cé­ra­tion. Une par­tie des sen­si­bi­li­tés cultu­relles, je dirais que nous devons recon­naître de la part de la popu­la­tion géné­rale. Je vais com­men­cer avec la stig­ma­ti­sa­tion de l’in­car­cé­ra­tion et en faire un bouc émis­saire, parce que c’est facile s’en prendre à quel­qu’un qui a déjà été doig­té pour avoir fait du mal et ensuite déclen­ché des gens qui sont trau­ma­ti­sés. S’ils ren­contrent quel­qu’un qui est un auteur d’un crime qu’ils ont beau­coup souf­fert sou­vent, cela va être un déclen­cheur pour eux.

Ce sont donc des défis que nous rele­vons dans notre pro­gramme à mesure que les gens obtiennent leur diplôme et que nous les inté­grons. Les dif­fé­rentes manières d’a­bor­der ce pro­blème, je dirais que cela vient immé­dia­te­ment de la com­mu­ni­ca­tion, et puis il suf­fit de suivre les codes légaux tels qu’ils sont. Vous savez, ça s’ap­pelle le Ser­vice cor­rec­tion­nel. C’est pas appe­lé tirage au sort et quart sur la place publique et jeter les gens. Nous tra­vaillons sous l’i­dée que cha­cun est res­pon­sable et que per­sonne n’est jetable. Cer­taines per­sonnes ne peuvent pas sup­por­ter ça, et vous ne vou­lez pas appuyer sur des bou­tons. Cepen­dant, dénon­cer ce genre de pré­ju­gés est ce que nous devons faire en tant que socié­té civile si nous vou­lons avan­cer. Et nous sommes pas­sés du stade d’at­trac­tion et de thé­sau­ri­sa­tion des gens sur la place publique vers l’in­car­cé­ra­tion. J’es­père que nous pour­rons constam­ment deve­nir un peu plus parfaits.

L’autre sen­si­bi­li­té cultu­relle, bien sûr de la part des per­sonnes incar­cé­rées, est le syn­drome de l’imposteur. Quand les gens com­mencent à se prendre en charge, ça fait peur. Je veux dire, tu dépends d’une ins­ti­tu­tion presque comme nous, quand nous sommes à l’é­cole, et donc la manière d’y par­ve­nir consiste à être vous-même vul­né­rable. En tant qu’ar­tiste, je dois racon­ter tout le temps. « Oh ouais, j’a­vais vrai­ment peur cette fois-là sur scène », ou c’est ce que j’ai appris de cette per­sonne, ou quand j’in­vite des gens à faire des ate­liers et une per­sonne incar­cé­rée me dira : « Wow, j’ai beau­coup appris ce jour-là »… J’ai beau­coup appris ce jour-là !

Donc régle­men­ter et se mettre au même niveau que les gens aide vrai­ment à lut­ter contre cet état de syn­drome de l’im­pos­teur qui peut être débilitant.

Cela peut être débi­li­tant pour nous tous, sans par­ler des per­sonnes qui ont pur­gé une peine.

Sur l’a­no­ny­mat et l’é­thique de la créa­tion de contenu

En termes d’éthique autour du conte­nu, la créa­tion et ce qui lui arrive, je peux par­ler spé­ci­fi­que­ment à notre modèle, qui est l’a­no­ny­mat en sor­tie de la musique. Alors qu’est-ce que ça fait bien, cela pro­tège l’a­gres­seur. Il pro­tège éga­le­ment des vic­times qui pour­raient être trau­ma­ti­sées si elles voyaient le nom de quel­qu’un lié à une œuvre qui aurait pu être faite avec beau­coup de sérieux, mais quand même cela ne leur impor­te­rait pas. Donc l’a­no­ny­mat, il pro­tège les deux par­ties contre les attaques et en même temps, il donne le contrôle et la pro­prié­té de la créa­tion au créateur.

Nous tra­vaillons donc sur la publi­ca­tion, pour apprendre aux gens à réel­le­ment régle­men­ter et contrô­ler leur propre conte­nu. Ils peuvent tou­jours faire des ver­sions lors­qu’ils sont en dehors. Ce truc qu’ils font pour le pro­gramme est dif­fu­sé gra­tui­te­ment, lié à des œuvres cari­ta­tives. C’est donc une façon d’ex­ploi­ter le temps dont les gens dis­posent à l’intérieur de manière très pro­duc­tive. Uti­li­ser ce temps au pro­fit des autres, et en le gar­dant à l’écart de la com­mer­cia­li­sa­tion. Et toute autre chose qui pour­rait être vive­ment critiquée.

Ce que signi­fie pour lui et pour les déte­nus le fait de faire de la musique dans les prisons

Je sup­pose que une autre chose dont il faut par­ler pour que tu saches pour­quoi je fais ce pro­jet. Quand j’ai vu la des­truc­tion des pro­grammes agri­coles, qui avaient un taux de réci­dive de 0,1, c’est-à-dire aucune per­sonne ayant subi ces pro­grammes étaient réci­di­vistes. Et j’ai com­men­cé à com­prendre pour­quoi, c’é­tait parce qu’ils cher­chaient à rem­plir les pri­sons, à cas­ser quelque chose et à ratio­na­li­ser la pri­va­ti­sa­tion. Il semble juste si cynique et sombre pour moi que j’a­vais juste besoin de m’en­ga­ger et de m’im­pli­quer. Et la musique est l’un de mes prin­ci­paux enga­ge­ments avec le monde, c’est donc ce que j’a­vais à offrir.

Je pense que, très vite, cela est deve­nu pour moi une preuve de l’im­por­tance de la musique, quand je l’ai vu créer autant d’éner­gie. Et il y a beau­coup d’his­toires de per­sonnes qui retrouvent leurs familles grâce à ce tra­vail. Et un nombre crois­sant de consi­dé­ra­tion pour cha­cun des per­sonnes incarcérées.

Les gens me disent quand ils sont sur le point d’al­ler cher­cher une libé­ra­tion condi­tion­nelle, « Oh, je ne veux pas par­tir avant que ce pro­jet n’est pas ter­mi­né » ou « Vas-tu res­ter ici parce que c’é­tait très impor­tant pour mon ami qui est tou­jours impli­qué ici. » Et juste cette idée qu’ils sont pen­ser d’une manière exté­rieure est pour moi une par­tie de liber­té que ce tra­vail offre à l’in­di­vi­du par leur propre tra­vail. Et ce que je consi­dère le suc­cès, c’est quand je vois ça. Et s’il y en a deux ou trois per­sonnes qui ont par­ti­ci­pé à ce pro­gramme pour un long moment. Que si à la fin de la jour­née, si ce ne concer­nait que ces trois per­sonnes, la décen­nie de tra­vail en valait la peine. On estime que plus d’un mil­lier ont sui­vi notre pro­gramme et nous cher­chons actuel­le­ment à nous étendre et à nationaliser.

Cela sera génial. Le suc­cès est vrai­ment, vrai­ment per­son­nel et très indi­vi­duel, et le tout ce que j’ai appris en fai­sant cela s’est appro­fon­di et j’ai relan­cé ma rela­tion à la musique et à moi-même.

Sur la prise en charge de soi dans le cadre du tra­vail en milieu carcéral 

Tout ce tra­vail est pro­fon­dé­ment émou­vant. J’é­taient très inté­res­sé à l’ex­pé­rience des autres, donc cela demande beau­coup de soins per­son­nels. Une des choses que je pra­tique est la méditation.

Per­son­nel­le­ment, je dis une heure par jour. je trouve c’est très, très utile pour moi de dis­cer­ner quel est mon rôle auprès des autres. Quand tu fais face aux gens qui ont vécu des moments dif­fi­ciles, la séduc­tion est le sen­ti­ment que vous pou­vez les répa­rer. Ce n’est pas pour­quoi nous sommes ici. Nous sommes juste là pour demeu­rer et pré­sen­ter une autre option, et l’art peut aider à faire cela si atti­rant. Et si tu peux t’en sor­tir de la men­ta­li­té d’é­go de la répa­ra­tion ou de l’aide, encore une fois, en vous met­tant au même niveau comme tout le monde, c’est une bonne chose pour prendre soin de soi. C’est, en quelque sorte, se lais­ser aller à la res­pon­sa­bi­li­té de cette façon, et je le répète, vous rendre vul­né­rable. C’est sain. Ça peut être effrayant, mais c’est la seule façon que je connaisse le faire.

Et 10 ans plus tard, j’ai vécu des expé­riences où j’ai fait du tra­vail thé­ra­peu­tique, des plantes médi­ci­nales, du tra­vail de bien-être, le tra­vail en pri­son n’ar­rive jamais dans ce contexte comme quelque chose qui me met à rude épreuve. Bien au contraire, cela me donne en fait.

Ce n’est peut-être pas ce à quoi vous vous atten­driez, mais quand vous êtes dans un endroit où chaque ins­tant d’at­ten­tion est appré­cié, c’est très très très posi­tif et il faut juste que tu te sépares de cet ego de cor­rec­teur ou du réparateur.

Tu n’es pas ça, tu es juste un ami en réalité.

 

Pour plus d’in­for­ma­tions sur Hugh Chris Brown, consul­tez son pro­fil d’ar­tiste ICI. Pour avoir un aper­çu de ce que fait Hugh Chris Brown, jetez un œil aux pro­jets sui­vants pré­sen­tés sur le PCM Hub :

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